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Le 07 décembre 2018

Avis rendus par la CNCDH sur l’AMP et la lutte des violences sexuelles

 

Le 20 novembre 2018, la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH), autorité administrative indépendante dont La Voix De l’Enfant est membre, a rendu deux avis à la suite de nombreux groupes de travail. L’un concerne l’assistance médicale à la procréation (AMP), l’autre la lutte contre les violences sexuelles. Ces deux sujets ayant directement trait à l’intérêt de l’enfant, il était important pour la Voix De l’Enfant d’y participer.

L’avis relatif à l’AMP a été rendu dans le cadre du réexamen des lois bioéthiques.

Pour consacrer le principe d’égalité de traitement et la cohérence du système juridique français, la CNCDH recommande l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes célibataires. Elle rappelle néanmoins qu’il n’existe pas de « droit à l’enfant » et que tout projet parental formulé dans le cadre d’une AMP est soumis au respect de l’intérêt de l’enfant à naître.

S’agissant de l’établissement de la filiation, elle recommande l’extension du bénéfice de l’article 311-20 du Code civil[1] aux couples de femmes en supprimant dans cet article les références aux différences sexuées. Ainsi, un consentement à l’AMP serait donné devant le juge ou le notaire. Puis, après l’accouchement, il y aurait une présomption de co-maternité pour les couples mariés et une attestation de consentement à remettre à l’officier d’état civil pour les couples non-mariés.

Elle considère en outre que, s’agissant du régime juridique du don de gamètes, il est essentiel de sauvegarder les trois piliers que sont la liberté, la gratuité et l’anonymat, tout en y apportant les aménagements requis par le respect des droits des femmes et des personnes conçues au moyen d’un tiers donneur.

Pour ce qui est de l’anonymat, la règle s’oppose aujourd’hui à ce que l’identité du donneur puisse être révélée, mais également à ce que les enfants accèdent directement aux informations médicales. Pour la CNCDH, il convient de conserver l’anonymat des donneurs et donneuses mais de permettre aux enfants d’accéder à des informations non-identifiantes, notamment médicales, relatives à leur donneur. Par ailleurs, elle se prononce en faveur de la possibilité pour les personnes issues d’une AMP avec un tiers donneur d’accéder, à leur majorité, à l’identité des donneurs si ces derniers y consentent.

 

L’avis relatif à la lutte contre les violences sexuelles a été rendu suite aux vifs débats qui ont eu lieu ces derniers mois.

La CNCDH souligne l’importance du renforcement du volet préventif de l’action publique, pour agir en amont, sur la dimension sociétale des violences sexuelles, et d’améliorer les dispositifs d’accompagnement et de prise en charge des victimes.

Elle insiste, entre autres, sur l’importance d’un renforcement de la protection des victimes mineures. De ce fait, elle recommande d’encourager la collecte de données et la recherche sur les violences sexuelles sur mineurs et, plus largement, sur les violences intrafamiliales. Elle préconise l’extension de l’obligation de signalement de suspicion de maltraitance sur mineurs à tous les médecins et de saisir l’occasion des visites médicales obligatoires à 6 et 12 ans pour favoriser la détention précoce de violences subies. Elle recommande également de garantir les moyens de mettre effectivement en œuvre, sur tout le territoire français, l’éducation à la vie affective et sexuelle, dès les premières étapes de la scolarité et tout au long du parcours éducatif et de mettre en place un contrôle adapté de l’accès des jeunes à la pornographie. Elle invite en outre le gouvernement à mobiliser les moyens humains et financiers nécessaires pour que les dispositifs de protection de l’enfance soient pleinement opérationnels sur tout le territoire.

Par ailleurs, elle se positionne pour une amélioration de la réponse pénale. Elle recommande ainsi un renforcement des dispositifs de prise en charge psychologique, médicale et sociale des victimes de violences sexuelles, et de considérer les propositions formulées en février 2018 par le groupe de travail de la commission des lois du Sénat sur les infractions sexuelles commises à l’encontre des mineurs[2].

S’agissant de l’allongement du délai de prescription de 20 à 30 ans pour les crimes sexuels contre les mineurs de 15 ans, la CNCDH en prend acte avec regret et appelle le législateur à refuser l’imprescriptibilité réclamée par certaines associations de victimes.

Elle recommande en outre la création d’un crime sui generis réprimant les actes de pénétration sexuelle commis par un majeur sur la personne d’un mineur de 13 ans, ainsi qu’un délit sui generis réprimant tout autre acte sexuel commis par un majeur sur la personne d’un mineur de 13 ans. Elle préconise que l’âge de la victime, entre 13 et 15 ans, demeure une circonstance aggravante du crime de viol et du délit d’agression sexuelle et elle recommande la suppression du délit d’atteinte sexuelle.

Ces deux avis sont disponibles sur le site internet de la CNCDH.

[1] Article 311-20 du Code civil : Les époux ou les concubins qui, pour procréer, recourent à une assistance médicale nécessitant l’intervention d’un tiers donneur, doivent préalablement donner, dans des conditions garantissant le secret, leur consentement au juge ou au notaire, qui les informe des conséquences de leur acte au regard de la filiation.

Le consentement donné à une procréation médicalement assistée interdit toute action aux fins d’établissement ou de contestation de la filiation à moins qu’il ne soit soutenu que l’enfant n’est pas issu de la procréation médicalement assistée ou que le consentement a été privé d’effet.

Le consentement est privé d’effet en cas de décès, de dépôt d’une requête en divorce ou en séparation de corps ou de cessation de la communauté de vie, survenant avant la réalisation de la procréation médicalement assistée. Il est également privé d’effet lorsque l’homme ou la femme le révoque, par écrit et avant la réalisation de la procréation médicalement assistée, auprès du médecin chargé de mettre en œuvre cette assistance.

Celui qui, après avoir consenti à l’assistance médicale à la procréation, ne reconnaît pas l’enfant qui en est issu engage sa responsabilité envers la mère et envers l’enfant.

En outre, sa paternité est judiciairement déclarée. L’action obéit aux dispositions des articles 328 et 331.

[2] http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/commission/groupe_travail/gt-infrac-sexuelles-dp.pdf

 

 

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